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Dires et ecrits des imams et savants au sujet du Soufisme



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al-Hassan al-Basri (d. 110)

L’un des premiers Soufis formels dans le sens littéraire et général, puisqu’il vêtit toute sa vie un manteau de laine (souf). Le fils d’une esclave libérée de Oumm Salama (la femme du Prophète ), et d’un esclave affranchi de Zayd ibn Thabit (le fils adoptif du Prophète ), ce grand Imam de Basra, le leader des saints et des savants de son temps, était connu pour sa stricte observance de la Sunna du Prophète. Il fut aussi fameux pour son immense savoir, son austérité et son ascétisme, ses intréprides reproches aux autorités, son pouvoir d’attraction par la parole et par ses apparitions.


Ibn al-Jawzi écrit un livre de 100 pages sur sa vie et ses caractères intitulé Adab al-Chaykh al-Hassan ibn al-Hassan al-Basri. Dans son chapitre sur al-Hassan dans Sifat al-safwa, il mentionne qu’al-Hassan laissa un manteau blanc (joubba) en laine, c’est le seul vêtement qu’il avait revêti au cours des vingt-cinq dernières années de sa vie, en été comme en hiver, et que lorsqu’il mouru, il était d’une impeccable beauté, propre, et de bonne qualité.[45]

Dans le livre qu’il consacra aux dires et aux actions des Soufis, Rawdat al-mihibbin wa nouzhat al-moushtaqin (Le jardin des amoureux et l’excursion des nostalgiques), Ibn Qayyim rapporte:

Un groupe de femmes sortirent le jour de la `Id et regardèrent les gens. On leur demanda: «Quelle est la personne la plus belle que vous avez vue aujourd’hui?» Elles répondirent: «C’est un cheick portant un turban noir.» Elles voulaient dire Hassan al-Basri.[46]

Le maître de hadiths Abou Nou`aym al-Isfanahi (d.430) mentionne dans ses biographies de Soufis intitulées Hilyat al-awliya' (L’ornement des saints) que c’est le disciple de Hassan al-Basri, `Abd al-Wahid ibn Zayd (d.177) qui fut la première personne à construire un hospice spirituel (khaniqa soufi) ou maison de l’hôte et une école à Abadan qui de nos jours fait frontière entre l’Iran et l’Iraq.[47]

Ce fut sur les bases de Hassan al-Basri et sur la renommée de ses disciples reconnus comme Soufis qu’Ibn Taymiyya dit dans son essai al-Soufiyya wa al-fouqara: «L’origine du tassawwouf est Basra».[48] Ceci une est déclaration trompeuse qui équivaut à accuser al-Hassan d’avoir inventé le tassawwouf. Au contraire, Basra est en tête parmi les places renommées pour le développement officiel des écoles de purification qui vinrent à être connues comme tassawwouf et dont les principes ne sont rien d’autre que le Coran et la Sunna comme nous l’avons déjà démontrer abondamment.

Ghazali rapporte les dires de al-Hassan sur la jihad al-nafs dans la section de son Ihya' intitulé Kitab riyadat al-nafs wa tahdhib al-akhlaq wa mou'alajat amrad al-qalb (Le livre du dressage de l’égo et la discipline des comportements et la guérison des maladies du cœur):

Deux pensées parcourent l’esprit, une provenant d’Allah, une provenant de l’ennemi. Allah couvre de miséricorde un serviteur qui s’installe dans la pensée qui vient de Lui. Il étreind la pensée qui vient d’Allah, tandis qu’il lutte contre celle qui vient de l’ennemi. Pour illustrer l’attraction mutuelle du cœur entre ces deux pouvoirs, le Prophète dit: «Le cœur du croyant repose entre deux doigts du Miséricordieux»[49]… Les doigts signifient le bouleversement et l’hésitation dans le cœur… Si l’Homme suit les ordres de la colère et de l’appétit, la domination de satan apparaît en lui à travers les passions oisives (hawa) et son cœur devient le nid et le contenant de satan, qui se nourrit de passions. S’il combat ses passions et ne les laissent pas dominer son ego, imitant en ceci le caractère des anges, à ce moment son cœur devient le lieu de quiétude des anges et ils s’y posent.

Une mesure de la dimension du scrupule (wara') et de la peur de Hasan Al-Basri envers Allah est illustrée par sa déclaration suivante, citée aussi par Ghazali:

L’oubli et l’espoir sont deux puissantes bénédictions sur les descendants d’Adam; mais pour cela les Musulmans ne devraient pas marcher dans les rues.[50]

Imam Abou Hanifa (d.150)

Ibn `Abidin rapporte dans son al-Dourr al-moulkhtar que l’Imam Abou Hanifa dit: «Si je n’avais pas eut deux années, j’aurais péri.»

Ibn `Abidin commente:

Pendant deux années, il accompagna Sayyidina Ja`far al-Sadiq et il acquit la connaissance spirituelle qui fit de lui un gnostique dans la Voie… Abou `Ali Daqqa (le cheick de l’Imam Qouchayri) reçu l’initiation d’Abou al-Qasim al-Nasiribadi, qui la reçu d’al-Chibli, qui la reçu de Sari al-Saqati qui la reçu d’al-Ma`rouf al-Karkhi, qui la reçu de Dawoud at-Ta`i, qui reçu les deux connaissances, l’interne et l’externe de l’Imam Abou Hanifa.[51]

Soufyan al-Thawri (d.161)

Ibn Qayyim al-Jawziyya rapporte dans Madarij al-salikin, et Ibn al-Jawzi dans le chapitre intitulé «Abou hashim al-Zahid» dans son Sifat al-safwa après le maître de hadiths Abou Nou`aym dans son Hilyat al-awliya', que Soufyan al-Thawri dit:

Si ce n’était pas à cause d’Abou Hachim al-Soufi (d.115), je n’aurais jamais perçu la présence des plus subtiles formes d’hypocrisie en moi … Le meilleur est le Soufi érudit en jurisprudence.[52]

Ibn al-Jawzi rapporte aussi le passage suivant:

Abou Hachim al-Zahid dit: «Allah a marqué l’aliénation sur le monde afin que la compagnie fraternelle des mouridin (les aspirants) ne consiste qu’à être uniquement avec Lui et non avec le monde, et afin que ceux qui Lui obéissent viennent à Lui en négligeant le monde. Le Groupe des connaisseurs d’Allah (ahl al-ma`rifa billah) sont étrangers dans le monde et ont très envie de l’au-delà.»[53]

Imam Malik (94-179 H/ 716-795)

Un savant de Madina, fut connu pour sa grande piété et son amour pour le Prophète , qu’il aimait et vénérait à tel point qu’il ne montait jamais à dos de son cheval dans les limites de Madina en guise de respect à la terre qui contenait le corps du Prophète , il ne rapportait aucun hadith sans avoir accompli d’abord son ablution. Ibn al-Jawzi rapporte dans le chapitre intitulé «La couche 6 des gens de Madina» dans son livre Sifat al-sawfa:

Abou Mous`ab dit: J’entrai pour voir Malik ibn Nas. Il me dit: "Regarde à ma place de prière ou sous ma natte de prière voit ce qu’il y a". Je regardai et j’y trouvai une certaine écriture. Il me dit : "Lis la!" Je constatai qu’elle contenait le récit d’un rêve que l’un de ses frères avait fait et qui le concernait. Il dit (lisant ce qui était écrit): «Je vis le Prophète dans mon sommeil. Il était dans sa mosquée et les gens étaient autour de lui, et il dit: J’ai caché sous ma chaire (minbar) une bonne chose – ou une connaissance – et j’ai ordonné à Malik de vous la distribuer.» Malik alors pleura, je me levai et pris congé de lui.[54]

Juste comme Abou Hanifa et Soufyan al-Thawri implicitement affirmèrent la nécessité de suivre la voie soufie afin d’acquérir la perfection, l’Imam Malik ordonna explicitement la pratique du tassawwouf dans sa déclaration suivante comme un devoir des savants:

"Quiconque pratique le Tassawwouf sans étudier la Loi Sacrée (la jurisprudence) corrompt sa foi, alors que quiconque étudie la Loi Sacrée (la jurisprudence) sans pratiquer le Tassawwouf est un hérétique. Seulement celui qui combine les deux atteindra la vérité."

Cette déclaration est rapportée par le mouhaddith Ahmad Zarrouq (d.899), le hafiz `Ali al-Qari al-Harawi (d.1014), les mouhaddiths `Ali ibn Ahmad al-`Adawi (d.1190) et Ibn `Ajiba (d.1224) et autres.[55]

Ibn `Ajiba explique:

Cheick Ahmad Zarrouq dit: «Le tassawwouf a plus de deux milles définitions, qui vont toutes dans le sens de la sincérité et de la dévotion à Allah … Chaque définition correspond à l’état et l’étendue de l’expérience de celui qui le pratique, ce qui lui fera dire: «Le Tassawwouf est ceci ou cela.»

Il s’en suit que chacun des saints cités (dans le Hilyat al-awliya' d’Abou Nou'aym) qui ont une part de détermination sincère (sidq tawajjouh) ont une part dans le tassawwouf, et le tassawwouf de chacun consiste dans sa sincère détermination. En tant que règle, la sincère détermination est une nécessité de la religion dans la mesure où elle forme à la fois la manière et le contenu des actions qu’Allah accepte. La manière et le contenu ne sont pas fiables à moins que la sincérité de la détermination soit fiable. «Il n’approuve pas la non reconnaissance en Ses serviteurs, mais si vous êtes reconnaissant, Il l’agrée pour vous» (39:7).

Ainsi l’Islam exige des actions, et il n’y a pas d’auto-purification (tassawwouf) sans la connaissance de la Loi (fiqh), car les commandes externes d’Allah ne sont connues que par la connaissance de la Loi; et il n’y a pas de connaissance de la Loi sans l’auto-purification, comme il n’y a pas d’action sans sincérité dans la détermination, et il n’y a rien sans croyance. Ainsi , par définition la Loi les exige toutes, juste comme le corps et l’esprit ont besoin l’un de l’autre, aussi comme l’on ne peut exister ou être complet dans le monde qu’en étant en conjonction avec les autres. Ceci est la définition de la déclaration de l’Imam Malik: «Celui qui pratique le Tassawwouf sans avoir appris la Loi Sacrée … » [56]


Imam Chafi`i (d.204)

Al-hafiz al-Souyouti rapporte dans Ta'yid al-haqiqa al-`aliyya que l’Imam Chafi`i dit:

J’accompagnai les soufis et reçu d’eux trois mots: leur déclaration que le temps est un sabre: si tu ne le coupe pas, il te coupe; leur déclaration que si tu ne te préoccupe pas ton égo avec la vérité, il te préoccupera avec le mensonge; leur déclaration que la déprivation est une immunité.[57]

Le mouhaddith al-`Ajlouni rapporte aussi dans son livre Kachf al-Khafa wa mouzil al-albas que l’Imam Chafi`i dit:

Trois choses m’ont plu dans ce monde: éviter l’affection, traiter les gens avec indulgence et suivre la voie du tassawwouf.[58]

Imam Ahmad bin Hanbal (d.241)

Mouhammad ibn Ahmad al-Saffarini al-Hanbali (d.1188) rapporte dans son Ghidha' al-albab li-charh manzoumat al-adab de la part d’Ibrahim ibn `Abd Allah al-Qalanassi que l’Imam Ahmad dit au sujet des soufis:

«Je ne connais pas de gens meilleurs qu’eux.» Quelqu’un lui dit: «Ils écoutent la musique et ils atteignent des états extatiques.» Il dit: «Est-ce que tu les empêches de se réjouir quelque temps avec Allah?»[59]

Cheick Amin al-Kourdi dit: l’Imam Ahmad conseillant son fils dit:

«O fils, tu dois tenir compagnie avec les gens qui pratiquent le soufisme parce qu’ils sont une fontaine de savoir et leurs cœurs sont en constante invocation. Ils sont les ascétiques, et ils ont le plus puissant pouvoir spirituel.»[60]

L’Admiration des Soufis par l’Imam Ahmad est confirmée par son respect vis-à-vis de al-Harith al-Mouhassibi, quoiqu’il exprima un avertissement au sujet des difficultés de la voie Soufie pour ceux qui ne sont pas préparés à la suivre, dans la mesure où cela peut ne pas être facile pour la majorité des gens de suivre la voie de ceux au sujet desquels Allah dit au Prophète: «Et résigne-toi à la compagnie de ceux qui invoquent leur Seigneur matin et soir désirant Sa Face …» (18:28).

L’Imam al-Harith al-Mouhassibi (d.243)

Il fut l’un des premiers auteurs de traité de Soufis et maître de al-Jounayd. `Abd al-Qahir al-Baghdadi, Taj al-Din al-Soubki, et Jamal al-Din al-Isnawi, tous reconnaissent et réitèrent que «Sur les livres de al-Harith ibn Assad al-Mouhassabi sur le kalam, le fiqh, et le hadith reposent ceux parmi nous qui sont moutakallim (théologiens), faqih (juristes), et Soufis»[61] Ses livres encore existants sont:

· Kitab al-ri`aya li houqouq Allah (Le livre d’observance des droits d’Allah; Cheick al-Islam al-`Izz ibn `Abd al-Salam en écrivit une version abrégée.[62]

· Kitab al-tawahhoum (Le livre d’imagination), une description du jour du Jugement;

· Kitab al-Khalwa (Le livre de la retraite spirituelle);

· Rissalat al-moustarshidin (Traité pour ceux qui demandent à être guidé);

· Kitab al-Coran (Le livre de la compréhension du Coran);

· Kitab mahiyyat al-`aql wa ma’nahou wa ikhtilaf al-nas fihi (Le livre de la nature et le sens de l’esprit et les différences parmi les gens à ce sujet;

· al-Massa`il fi a’mal al-qouloub wa al-jawarih wa al-`aql (Les questions concernant les travaux des cœurs, des pieds et de l’esprit;

· Kitab al-`azama (Le livre de la magnificence);

· al-Wassaya wa al-nassa`ih al-diniyya wa al-nafahat al-qoudsiyya li naf`i jami' al-bariyya (Les héritages et conseils spirituels et les dons sanctifiés pour le bénéfice de toutes les créatures).

Le passage suivant est extrait d’al-Wassayat dans lequel al-Mouhassibi décrit le parcours de sa recherche de la vérité parmi les groupes variés de musulmans, son entrée dans la voie Soufie, et les caractéristiques des Soufis comparées aux non-Soufis:

Il a été clairement dit que cette Communauté sera divisée en soixante-dix groupes impairs, l’un d’eux est le groupe Sauvé, et Allah sait mieux au sujet du reste. J’ai consacré une partie de ma vie à étudier les différences de cette Communauté, cherchant la méthode claire et le droit chemin, recherchant le savoir et agissant par rapport à cette connaissance, guidé sur le chemin de l’au-delà aux moyens des directives des savants. Je compris une grande partie de la parole d’Allah (le Coran) à travers l’interprétation des juristes. J’ai contemplé les conditions de cette Umma, j’ai regardé ses voies de pensée et discours et j’ai compris de ce constat ce qui a été prédestiné pour moi.

Je vis leurs divisions comme un océan profond où plusieurs se sont noyés, et peu furent sauvés. Je vis que chaque groupe prétend que le salut est pour ceux qui les suivent et la destruction est pour tout ceux qui leur sont opposés. Ainsi je compris que les gens sont de différent types:

· Parmi eux est celui qui possède la connaissance de l’au-delà – il est très difficile de le trouver et il est rare;

· un autre type est l’ignorant; prendre ses distance de celui-ci est une bénédiction;

· un autre type est celui qui prétend être un savant, alors qu’il est attaché à la dunya, la préférant en réalité à toute autre chose;

· un autre type est celui possédant la connaissance, étant une référence pour la religion, mais utilisant sa connaissance comme une source de célébrité et de gain de prestige, échangeant sa religion pour le refus de cette dunya;

· un autre type est celui qui a la connaissance mais ne sachant pas le sens réel de ce qu’il possède;

· un autre type est celui qui apparait comme un ascétique, cherchant la vertu, mais il est impuissant, et sa connaissance ne peut pénétrer les cœurs de son audience, et ses dires ne sont pas fiables;

· un autre type est celui doté d’intelligence et de savoir, alors qu’il manque d’abstinence - à travers - la peur d’Allah (wara') et sa méfiance (taqwa);

· un autre type sont les disciples de leurs passions et de leurs bas-désirs, ceux qui s’humilient pour l’amour de la dunya, cherchant une position élevée ;

· un autre type ce sont les démons humains empêchant les gens de chercher l’au-delà, qui luttent comme des chiens pour la dunya, l’adulant, et ne voulant rien d’autre que d’en obtenir au maximum, qui partant de là sont vivants dans cette dunya, mais en réalité ils sont morts; ce qui est vrai est faux selon eux et ils considèrent les vivants et les morts égaux.

Je me cherchai une voie parmi ces différents types et je devins perplexe. Ainsi j’ai décidai d’être guidé par les guides, demandant du support et de la directive, et je pris la connaissance pour guide. Je réfléchi et examinai les choses méticuleusement, jusqu’à ce qu’elles me deviennent claires – avec le Livre d’Allah, la Sunna de Son Prophète , et le consensus de la Communauté pour preuve – il était évident que suivre son désir rend aveugle dans la recherche de la vérité, et que l’on perd sa voie vers la vérité, et accentue son aveuglement.

Alors je commençai à vider mon cœur de tous les bas-désirs (hawa), et je me concentrai sur les divisions de la Umma, à la recherche du Groupe sauvé, attentif à ceux qui ont suivi les désirs destructifs et les goupes égarés, faisant attention de ne pas faire un pas sans en être sûr, cherchant la voie du salut pour mon âme.

Ainsi je trouvai – comme l’unanimité de la Umma la dérive du Coran – que la voie du Salut est dans la peur d’Allah (taqwa), dans la performance des obligations, dans la peur d’Allah au sujet de ce qu’Il a permis et de ce qu’Il a interdit (wara') et les limites qu’Il a établies, dans la sincérité envers Allah à travers l’obéissance et suivant les exemples de Son Messager. Je cherchai le savoir des obligations (fara`id) et les pratiques Prophétiques (Sunna) des savants, des narrations, et je trouvai en eux à la fois l’accord et la division, mais je trouvai qu’ils s’accordent tous sur le fait que la connaissance des obligations et de la Sunna sont avec ceux qui connaissent Allah et Ses ordres, les Connaisseurs d’Allah qui agissent selon Son bon plaisir, craignant pleinement de violer ce qu’Il a interdit, se façonnant de l’exemple de Son Messager, et préférant l’Au-delà à ce monde: ce sont ceux qui s’accrochent fermement aux commandes d’Allah et aux voies des Messagers.

Alors, je regardai parmi cette Communauté pour ce genre de serviteurs qui sont connus pour leurs talents, et cherchai à bénéficier de leur savoir, et je trouvai qu’ils étaient extrêmement rares et peu nombreux, et que leur genre de savoir est en train de disparaître, comme le Messager d’Allah l’a dit: «Lorsque l’Islam commença ils étaient étranges, et ils deviendront étranges encore, comme au début, et la bonne nouvelle est aux étranges»[63] – et ils sont solitaires avec leur religion. Je sentis que ma calamité augmentait du fait de la disparition des saints Vertueux (al-awliya' al-atqiya'), et j’eus peur qu’une mort soudaine m’arrive pendant que je suis encore troublé sur la division de cette Umma. Alors je commençai à chercher un maître: et je n’avais pas d’autre choix que d’en trouver un, et je fis de mon mieux jusqu’à ce que Celui qui est Affectueux envers Sa Création me permis de rencontrer leur groupe .

Je trouvai en eux les signes de Taqwa et les qualités de wara' et la préférence de akhira sur la dunya, et trouvai que leurs intructions et leurs conseils sont en conformité avec les actions des maitres de guidance, et je les trouvai regroupés, unis à donner des conseils à la Communauté, n’encourageant personne à Lui désobéir ni à perdre espoir en Sa Miséricorde, ils acceptent toujours et patiemment les fardeaux et les difficultés, ils sont contents avec le destin et reconnaissant dans la prospérité. Ils emmènent la création à aimer leur Seigneur en parfait repentir en leur rappelant Ses faveurs et ses bontés, et ils les encouragent à remettre toutes leurs affaires à Allah, à leur faire connaître Sa Grandeur, Son livre et la Sunna, Sa Religion, Ce qu’Il aime et ce qu’Il n’aime pas, à être prudent et éviter les nouveautés et les caprices, se garder des extrêmes et des exagérations, mépriser les disputes et les arguments, se garder de la médisance et de l’oppression, s’opposer à leurs désirs, prendre leur responsabilité, contrôler leurs sens, être prudent dans leur nourriture, leur habillement et toutes leurs situations, évitant tout ce qui est douteux, évitant les bas-désirs, se satisfaire du minimum de nourriture, supprimer ce qui est indifférent, la renonciation en ce qu’il est permissible, la peur du Jugement, la circonception de la Résurrection, être affairé avec leur propre fardeau, strict avec eux-même et non avec les autres. Chacun d’eux a ses propres affaires qui le préoccupent, chacun d’eux est savant concernant l’Akhira et la description du Jour du Jugement, l’abondante récompense et la douloureuse punition. Ceci est ce qui explique leur constante anxiété et incessante inquiétude qui les éloigne de la joie de la dunya et ses plaisirs.

Ce groupe a endossé les caractères de cette religion, et dessiné les lignes définitives pour la renonciation (wara') d’une manière qui a contracté ma poitrine avec peur, et me rendit clair que la conduite de la religion et la sincérité mêlées à la crainte (wara') est un océan que quelqu’un comme moi ne peut pas comprendre; ainsi je vins à réaliser l’étendue de leurs vertus, à voir clairement leur inquiétude, et je devins de plus en plus certain qu’ils sont ceux qui luttent dans la Voie de l’au-delà, les vrais disciples de l’exemple des Messagers, la source de ceux qui demandent à être éclairé, et des conseillers pour ceux qui ont besoin de conseils.

Ainsi je commençai à m’intérresser à leur voie, bénéficiant d’eux, acceptant leur code de conduite, prenant plaisir à leur obéir. Je ne vois rien d’égal à eux, et je ne préfère rien à eux, et Allah me bénit avec un genre de connaissance dont la véracité me devint claire et dont j’ai vu la totalité. J’espère que le salut atteindra ceux qui l’accepte et l’adopte, et je suis certain que le support viendra à quiconque la pratiquera.
J’ai trouvé de la malhonnêteté en ceux qui s’opposent à cette voie, et la rouille s’est accumulée sur le cœur de quiconque l’ignore et la nie. J’ai découvert que la preuve suprême est avec celui qui la comprend et j’ai découvert que l’adopter et agir en s’y conformant est une obligation pour moi; ainsi j’y ai cru de tout cœur et l’ai gardé dans ma conscience et fait d’elle la fondation de ma religion, et j’y ai établi mes actions, et je suis passé à travers différents états d’expérience.

J’ai demandé à Allah de me donner l’abilité de Le remercier pour la Générosité qu’Il a répandu sur moi et de me donner la force de performer les tâches se rapportant à ce qu’Il m’a enseigné, sachant mes défauts et sachant que je ne pourrai pas Le remercier suffisamment.[64]

La Piété de L’Imam Ahmad devant Al-Mouhassibi

Voici le récit de la première fois que l’Imam Ahmad a entendu al-Mouhassibi parler directement, raconté par le hafiz al-khatib al-Baghdadi dans son Histoire de Bagdad:

Ahmad ibn Hanbal n’aimait pas les spéculations de al-Harith dans la science du calame de même que les livres qu’il éditait. Fréquemment, il mettait les gens en garde contre al-Harith. Mouhammad ibn Ahmad Yaqoub appris de Mouhammad ibn Nou`aym al-Dabbi: J’entendis l’Imam Abou Bakr Ahmad ibn Ishaq - al-Sibji - dire: J’entendis Isma`il ibn Ishaq al-Sarraj dire: «Ahmad ibn Hanbal me dit un jour: J’ai appris que ce Harith est souvent chez toi. Qu’en est-il si tu m’invitais et me plaçais quelque part où je pourrais l’entendre sans être vu?» Je répondis: «Certainement, O Abou `Abd Allah!» et j’étais content de ce premier pas de sa part. Je partis et je demandai à al-Harith de venir nous visiter cette même nuit comme ses compagnons y seront aussi. «O Isma`il, ils sont nombreux, par conséquent tu ne leur serviras que de l’huile et des dattes, et seulement ce que tu peux.» Je suivis ses intructions et je partis informer Abou `Abd Allah. Il vint après Maghrib, alla s’installer dans une petite chambre la-haut et commençai à réciter ses dévotions usuelles (wird). Al-Harith et ses compagnons arrivèrent, mangèrent, et se levèrent pour prier salat al-`icha, et ils ne prièrent pas après cela. Ensuite, ils s’asseillèrent silencieusement devant al-Harith et ne dit aucun mot jusqu’au milieu de la nuit. L’un d’eux alors posa une question à al-Harith et celui-ci commença à parler. Ses compagnons l’écoutèrent comme s’ils avaient peur d’effrayer un oiseau. Certains pleuraient. D’autres poussaient des petits sanglots au fur et mesure qu’il parlait. Je partis alors dans la chambre pour voir Abou `Abd Allah et le trouvai évanoui à force d’avoir pleuré. Je redescendis. Ils continuèrent ainsi jusqu’au matin où ils se levèrent et s’en allèrent. Je retournai là-haut voir Abou `Abd Allah. Il avait changé. Je lui demandai: «Que penses-tu maintenant de ces gens?» Il dit: «En ce qui me concerne, je n’ai jamais vu leur pareil, ni entendu sur la Science des Réalités (`ilm al-haqa`iq) des mots comme ceux prononcés par cet homme. Néanmoins, malgré ce que je viens de dire, je ne te vois pas en vérité apte à leur tenir compagnie. Ensuite il se leva et s’en alla.[65]

Al-Soubki expliqua la réaction ambigüe de l’Imam Ahmad de la façon suivante:

Considérons ce récit avec attention et sachons que Ahmad ibn Hanbal ne considérait pas sage pour cet homme (al-Sarraj) de joindre leur compagnie parce qu’il n’était pas l’un de ceux qui pourrait s’élever à leur niveau. En vérité, ils étaient sur un chemin difficile ; tous les gens ne peuvent pas entreprendre équitablement ce chemin qui fait peur. Autrement, Ahmad aurait-il pleuré et glorifier al-Harith de la manière dont il fait ses éloges?[66]

Quelqu’un pourrait soulever des objections:
Question. Al-Harith et ses compagnons ont prié salat al-`icha' pendant que Ahmad était présent. Pourquoi Ahmad n’a t-il pas joint la prière prescrite, sachant précisément que la position d’Ahmad était de joindre la prière du groupe celle-ci étant obligatoire?

Réponse. Ahmad était avec le groupe, mais à l’étage, séparé du groupe, précisément dans une chambre où il pourrait entendre - mais sans nécessairement voir al-Mouhassibi, comme le rapport le mentionne? Plus loin:

- Ce n’est pas affirmé dans le rapport qu’il n’a pas prié derrière lui.
- C’est possible qu’il ne fusse pas en ablution.
- C’est possible qu’ils aient retardé le temps de `Icha et qu’au moment où ils priaient, il avait déjà fini.

Le premier cas ci-dessus est le moindre qui peut être dit, et tous les cas ont tendance à dire: Il n’a pas délibérément prié derrière lui pour plusieurs raisons parmi lesquelles: on sait que `Oumar pria derrière al-Hajjaj ibn Youssouf al-Thaqafi qui était un tyran qui répendit le sang d’innocents; il est aussi su que Ibn `Oumar pria derrière les Gens d’Innovation dont les Khawarij. Il disait souvent que: «La prière est une excellente action (hassana) et cela m’est égal que quiconque y prenne part avec moi et quiconque dit: Hayya `ala al-Salat, je lui répond oui.» [67]

Dire que l’Imam Ahmad ne pria pas délibérement derrière al-Mouhassibi est équivalent à attribuer à l’Imam Ahmad l’un des points de vue suivant:

- Ou bien il considérait al-Mouhassibi pire que al-Hajjaj et les Kwararij, ce qui est absurde et impieux;
- Ou bien il laissa la pratique du Sahaba `Abd Allah ibn `Oumar, quoique le madhab Hanbali est en partie une revivication de celle-ci, et ceci n’est pas le cas.

Question. Pourquoi Ahmad mentionna-t-il `ilm al-haqa`iq (la science des réalités) qui est une terminoligie Soufie?

Réponse. L’Imam Ahmad acceptait la terminologie Soufie. Il n’y a plus rien à dire à ce sujet. Supposer que cela est peu probable est parfaitement acceptable, mais supposer que ceci est impossible est faux. Encore, la fin de l’argument est que le rapport est fiable selon le critère des maîtres de hadiths, ainsi laissons la spéculation dans la mesure où nous avons une évidence solide.

Q. Pourquoi al-Dhahabi n’acceptait-il pas l’authenticité du récit?

R. al-Dhahabi fit des commentaires ambigus dans son Mizan al-I’tidal au sujet du récit ci-dessus, mais il ne questionne pas l’authenticité de sa chaîne de transmission. Il l’authentifie mais y exprime de la mécréance[68]. Cependant, son rejet subjectif, quoique connaissant le sujet – sa biographie de l’Imam Ahmad est d’environ 300 pages – n’est pas crédible devant l’évidence.

Il est clair que Dhahabi admirait al-Mouhassibi car il l’appela «d’un haut niveau» dans son Siyar a`lam al-noubala':

L’Ascétique, le Connaisseur…Je dis: al-Mouhassibi est d’un haut rang, et il toucha brièvement à la théologie spéculative; par conséquent, il eut des reproches à ce niveau.[69]

Tous les maîtres Soufis sont des savants de la Sunna, autrement ils ne seraient pas qualifiés de maîtres Soufis. De l’autre côté, plusieurs grands savants qui ne sont pas des maîtres Soufis admiraient profondément ces gens et voyaient clairement qu’ils étaient du groupe des élus d’Allah ou des awliya. L’histoire et ces jours présents sont remplis d’innombrables Savants de l’Islam, des muftis de nations aux cheicks al-Ahzar, et des ministres de l’Education Islamique aux Présidents des Ligues de Savants Islamiques, qui ont vu et compris que ces maîtres Soufis pratiquaient mieux la Sunna que ceux qui mémorisaient seulement les lois de la Chari`a. Plusieurs maîtres Soufis ont atteind de hautes positions parmi les savants de l’Islam de leur temps.

Certains aujourd’hui sont enclin à utiliser le terme «conflit» entre ce qu’ils imaginent être maîtres de tassawwouf d’un côté et non-savants Soufis de l’autre. Ceci est une dichotomie artificielle qui n’existe pas en réalité dans la communauté du Prophète. Cependant, certains frères non informés ou mal intentionnés prennent quelques citations illustrant des différences parmi les savants en vue de désunir et de créer l’image de ce qu’ils appellent «une histoire de conflict».

En réalité, les savants représentant les Quatre Madhahib en Islam ont défendu ceux qui pratiquent le tassawwouf de la diffamation érigée contre eux en certaines parties du monde Islamique. Pourquoi alors encore aujourd’hui certains sont-ils en train de fouiller les livres de littérature Islamique essayant de raviver quelques insignifiantes issues déjà résolues et semer le doute dans les cœurs de nos frères au sujet des voies de l’Islam? Ils mentionnent par exemple la censure d’Ibn al-Jawzi de quelques excès dans Talbis Iblis comme si c’était une condamnation entière du tassawwouf, oubliant qu’il écrivit plusieurs pages et des livres entiers sur les premiers Soufis dont Rabi`a al-`Adawiyya et Ibrahim al-Adham; ou bien ils mentionnent le blâme de kalam de l’Imam Ahmad dans la méthode de Mouhassibi, oubliant qu’il admirait beaucoup les discours Soufis d’al-Mouhassibi; ou bien ils citent le rapport de al-Dhahabi sur la censure d’Abou Zour`a d’al-Mouhassibi et la lamentation de Dhahabi sur le niveau médiocre d’érudition de hadith dans les livres Soufis, oubliant que Dhahabi admirait al-Mouhassibi et exprimait le plus grand respect pour les Soufis.

Il est étrange que Dhahabi soit cité pour illustrer des points de vue anti-Soufis alors qu’il dit explicitement au sujet de l’un des Soufis qui fut le plus attaqué, Ibn al-Farid: «Ne vous empressez pas à le juger.» Ici est la remarque de Dhahabi sur Ibn al-Farid dans Mizan al-i`tidal:

Il rapporta des hadiths de al-Qassim ibn `Assair; il parla haut d’une union franche avec Allah dans sa poésie, et ceci est une grande calamité: par conséquent, examinez précieusement ses compositons et ne vous empressez pas de juger, au contraire, aillez la meilleure opinion des Soufis (hassin al-zanna bi al-soufiyya).[70]

Voici encore d’autres extaits et exemples des éloges des Soufis de Dhahabi, tirés de Siyar a`lam al-noubala':
[#506] al-`Abdin connu sous le nom de Qassim al-Jou`i (d.248): l’Imam, le modèle, le saint, le Mouhaddith…le cheick des Soufis et l’ami d’Ahmad ibn al-Hawari. Il est connu comme al-Jou`i.

… Je dis, les acsétiques (zouhhhad) de ce temps étaient al-Jou`i à Damas, al-Sari al-Saqati à Bagdad, Ahmad ibn Hard à Naysabour, Dhou al-Noun en Egypte, et Mouhammad ibn Aslam à Tus. Où sont les semblables à ces maîtres? Seulement la poussière remplira mes yeux, ou ce qui est sous la poussière!

[#969] Chihab al-Din al-Souhrawardi; le cheick, l’Imam, le savant, le zahid, le connaisseur, le Mouhaddith, le Cheick Al-Islam, le Hors-Pair des Soufis…

[#512] Je dis: si vous voyez le Soufi se consacrer au hadith, alors ayez confiance en lui, et si vous le voyez s’éloigner du hadith alors retirez-vous de lui…

Ceci est une louange indirecte à tous les Soufis, dans la mesure où aucun d’eux ne peut être que dévoué aux hadiths et s’y référant constamment. Ces lignes montrent que Dhahabi n’était en aucun cas contre le tassawwouf, au contraire, il protesta contre quelques éléments de quelques Soufis qu’il ne voyait pas être dans sa ligne de compréhension de la Sunna. Il ne considéra pas la différence entre les adhérents et simples prétendants au tassawwouf, quoiqu’il le mentionna ailleurs .

© Encyclopédie de la doctrine islamique, Cheikh Mouhammad Hisham Kabbani

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