De l’importance du dhikr silencieux



L’auteur du fiqh as-sunna écrit :

Le propos du dhikr est de purifier les coeurs et les âmes et d’éveiller la conscience de l’homme. Le Coran dit :

Récite ce qui t’est révélé par l’Écrit ; accomplis la prière. La prière réfrène l’infâme et la blâmable : le Rappel de Dieu est majeur. (29:45)

Autrement dit, le rappel de Dieu a un effet plus grand que la prière formelle obligatoire pour détourner quelqu’un d’actions honteuses et injustes. Cela vient de ce que lorsqu’un serviteur ouvre son âme à son Seigneur, chantant Sa louange, Dieu le fortifie de Sa lumière, augmente sa foi et sa conviction, et affermit son esprit et son coeur. Il est ici fait référence à :

ceux qui croient, de qui le coeur se rassérène au Rappel de Dieu ...
De quoi d’autre que du Rappel de Dieu sérénité peut-elle venir au coeur ? (13:28)

Et quand les coeurs sont satisfaits de la Vérité, ils se tournent vers les idéaux les plus hauts sans se laisser détourner par des pulsions de désir ou de convoitise. Voilà qui détermine l’importance du dhikr dans la vie humaine. De toute évidence, il serait déraisonnable d’espérer de tels résultats par la simple prononciation de certains mots, car des mots qui ne reposent pas sur la volonté du coeur sont sans conséquence. Dieu Lui-même nous a dit comment il fallait se souvenir de Lui :

Rappelle ton Seigneur en ton âme, dans la crainte et l’humilité, à voix contenue, soir et matin. Ne sois pas des indifférents. (7:205)

Ce verset indique que pratiquer le dhikr en silence, sans élever la voix, est meilleur. Un jour, au cours d’un voyage, le Prophète (que la paix et la bénédiction de Dieu soient sur lui) entendit un groupe de musulmans exprimer leurs suppliques à voix haute. Alors le Prophète (que la paix et la bénédiction de Dieu soient sur lui) leur dit :

Arrêtez-vous un peu. Vous ne vous adressez pas à quelqu’un de sourd ou d’absent. En vérité, Celui à qui vous vous adressez est à côté de vous et Il vous entend tous. Il est plus près de vous que le col de votre monture.

Ce hadith (muslim) souligne l’amour et le respect qu’on doit éprouver quand on entame le dhikr. sa`d a rapporté que le Prophète (que la paix et la bénédiction de Dieu soient sur lui) a dit :

Le meilleur dhikr est le dhikr caché, et la meilleure quantité d’argent est la quantité juste suffisante.

ahmad le cite dans son musnad, ibn hibbam dans son sahih et bayhaqi dans shu`ab al-iman. nawawi dit que ce hadith n’est pas établi avec certitude.

On lit dans le fatawa fiqhiyya de al-haytami (p. 48) :

On l’interrogea au sujet de ce que dit nawawi à la fin du chapitre intitulé " Assemblées de dhikr " dans son Commentaire du sahih muslim à savoir " le dhikr de la langue, accompagné de la présence du coeur, est préférable au dhikr du coeur seul ". ibn hajar dit : " Ce n’est pas parce que le dhikr du coeur est une pratique d’adoration établie au sens lexical (c’est-à-dire consistant en formules spécifiques) qu’il est préférable, mais parce qu’à travers ce dhikr on a l’intention d’exprimer dans son coeur qu’on exalte et qu’on magnifie Dieu au dessus de tout. Voilà le sens à la fois des mots de nawawi et de ce que disent certains : " Il n’y a aucun bienfait dans le dhikr du coeur ". En niant qu’il y ait un bienfait, on veut dire qu’il n’y a " aucune récompense pour les mots, qui ne sont pas prononcés ". En affirmant qu’il y a un bienfait, on veut dire " dans le fait que le coeur est présent " comme on vient de le dire. Réfléchissez bien à cela, car c’est important. Et Dieu sait mieux "

Selon les maîtres naqshbandis, le dhikr du coeur est plus utile au murid ou à l’élève car il est plus efficace pour secouer le coeur de l’indifférence et pour l’éveiller. shah naqshband a dit :

Il y a deux méthodes de dhikr, l’une silencieuse, l’autre à voix haute. Je préfère la façon silencieuse parce qu’elle est plus forte et par conséquent préférable.

shaykh amin al-kurdi a dit dans son livre tanwir al-qulub (Illumination des Coeurs), p. 522 :

Sache qu’il y a deux formes de dhikr, par le coeur (qalbi) et par la langue (lisani). L’un comme l’autre ont des fondements juridiques dans le Coran et la sunna. Le dhikr de la langue, qui combinent les sons et les lettres, n’est pas commode à pratiquer en permanence, car acheter, vendre ou être engagé dans des activités de ce type empêchent de concentrer son attention sur le dhikr. Le contraire est vrai du dhikr du coeur, ainsi nommé pour exprimer son autonomie par rapport aux lettres et aux sons. De cette manière, rien n’empêche celui qui le souhaite de pratiquer son dhikr : se souvenir de Dieu, dans le secret vis-à-vis de la création, hors du monde et sans prononcer de paroles. Ce rappel est le meilleur de tous : c’est de lui que s’écoulent les paroles des saints.

C’est la raison pour laquelle nos maîtres naqshbandis ont choisi le dhikr du coeur. En outre, le coeur est le lieu où Celui qui pardonne porte son regard, c’est le siège de la croyance, c’est le réceptacle des secrets et la source des lumières. S’il est solide, l’ensemble du corps est solide, et s’il ne l’est pas, l’ensemble du corps manque de solidité, ainsi que l’a clairement fait comprendre le Prophète (que la paix et la bénédiction de Dieu soient sur lui).

Pour confirmer ce qui vient d’être dit, bayhaqi rapporte, sous l’autorité de `a’isha :

Dieu accorde au dhikr (silencieux) soixante-dix fois plus de faveurs qu’au dhikr (à voix haute). Le Jour de la Résurrection, Dieu mettra les êtres humains face à Ses comptes, et les anges chargés d’enregistrer apporterons ce qu’ils auront enregistré et écrit, et Dieu Tout Puissant dira : " Voyons si quelque chose appartenant à Mes serviteurs n’a pas été oublié ? " Les anges diront : " Nous n’avons laissé de côté rien de ce que nous avons appris et enregistré, que nous avons pris en compte et écrit ". Dieu dit : " O Mon serviteur, il y a quelque chose de bien venant de toi, pour lequel Moi seul vais t’attribuer un bienfait, et qui est ton rappel silencieux de Moi ".

bayhaqi rapporte, également sous l’autorité de `a’isha :

Le dhikr que n’entendent pas les anges chargés de l’enregistrement vaut soixante-dix fois celui qu’ils entendent.